Une exposition d’Axelle Remeaud et Nolan Lem
Il y a un rapport étroit entre le son et l’érotisme, la capacité d’un son à provoquer une réaction physique. Alors que nous sommes habitués aux stimulations visuelles, l’excitation sonore reste taboue ou relayée aux notions de fétichisme ou autres extravagances sexuelles. Pourtant depuis déjà quelques années, la communauté ASMR (Autonomous Sensory Meridian Response, que l’on peut traduire par « réponse autonome du méridien sensoriel ») fédère toujours plus d’adeptes et les whisperers (les inconditionnels du chuchotement) interpellent la recherche scientifique. Cette technique de relaxation souvent utilisée pour parvenir à trouver le sommeil, suscite toujours plus d’intérêt. Alors qu’il s’agit d’une forme d’excitation non sexuelle, certains vont jusqu’à parler d’orgasme du cerveau.
Réunir le travail d’Axelle Remeaud et Nolan Lem dans le cadre d’une exposition nommée Bruire implique la présence de sons discrets et confus, souvent fait d’une succession de petits bruits.
Lem, créateur de machines hybrides aux mouvements répétitifs, invente des dispositifs sonores, proches de l’automate ou du bras robotisé. Sur fond d’efficacité exigée par l’industrialisation des Temps modernes et l’émergence d’une intelligence artificielle au service de la machine, ses œuvres sont porteuses d’une intrigue sexuelle. C’est peut-être cette dimension qui les rapproche des œuvres de Remeaud, chargées d’une mystérieuse sensualité.
Les choix plastiques d’Axelle Remeaud peuvent s’apparenter aux figures de style littéraire et notamment à la métonymie dont se rapproche le fétichisme. L’artiste fragmente le corps féminin et propose l’expérience de l’objet, à la fois étrange et familier : une chevelure sous forme de trophée, des bas-reliefs de seins, des bouts de doigts, des poils. Les attraits de la séduction féminine y sont décontextualisés. Erotisme souvent raffiné, recherche plastique et associations d’idées qui caractérisent le fétichisme, marque le travail de Remeaud.
Les réalisations hybrides de ces deux jeunes artistes sont à la fois séduisantes et effrayantes. Les sons et les formes nous y attirent. Les multitudes de micros bouches qui constituent l’ingénieux système du velcro utilisé par Nolan Lem ou les orifices doigtés d’Axelle Remeaud, qui ne sont pas sans évoquer les vagina dentata, nous invitent à nous rapprocher, pour saisir le bruissement d’un murmure incertain.
Mélanie Bellue, 2018
17 mars > 21 avril 2018
exposition, Arles
samedi 17 mars
14 h 00 > causerie d’artiste avec Julia Marchand
18 h 30 > vernissage